Posté il y a 1 moisTemps de lecture : 5 minutes
Trois questions au Pr Mathieu Ceccaldi, chef de service de neurologie de l'hôpital de la Timone à Marseille.
Existe-t-il aujourd’hui un traitement contre la maladie d’Alzheimer ?
La réponse est oui. Deux médicaments de la classe des anticorps monoclonaux présentent une efficacité modeste mais cliniquement significative chez des patients présentant une maladie d’Alzheimer à un stade léger. Le premier, le Lecanemab, a été approuvé par la Food and drug administration (1) et le dossier est en cours d’instruction auprès de l’Agence européenne du médicament. Le second s’appelle le Donanemab. Les résultats, positifs, de l’étude menée avec ce médicament ont été rendus publics mi-juillet lors du Congrès mondial Alzheimer qui s’est déroulé à Amsterdam.
Concrètement, ces médicaments sont administrés par voie de perfusion, tous les quinze jours pour le premier, tous les mois pour le second. Ils ciblent la protéine amyloïde dont l’agrégation dans le cerveau occasionne des lésions à l’origine de la maladie d’Alzheimer.
Cette avancée nous fait entrer dans une ère thérapeutique nouvelle puisque ces médicaments agissent sur le mécanisme même de la maladie et freinent son évolution. L’effet symptomatique observé sur l’état cognitif et fonctionnel des patients traités par ces anticorps se conforte au fur et à mesure qu’ils avancent dans le suivi prévu des essais, ce qui est conforme à un effet « en cascade » du traitement anti-amyloïde : en premier lieu la charge cérébrale en protéine amyloïde neurotoxique diminue dans le cerveau des patients, puis dans un second temps, on observe les conséquences cliniques d’un ralentissement de la neurodégénérescence et on peut penser que cet effet symptomatique devrait persister voire s’amplifier avec le temps.
Tous les patients pourront-ils en bénéficier ?
Non, les deux traitements ont été testés auprès de personnes présentant une maladie qualifiée de légère : soit chez des patients autonomes en phase prodromale (2), soit chez des patients se situant au stade de démence légère de la maladie. Dans les deux cas, ces traitements ont globalement ralenti d’un tiers le déclin cognitif et fonctionnel qui se produit habituellement sur les dix-huit mois qu’a duré l’étude.
Par ailleurs, ces médicaments présentent de potentiels effets secondaires, essentiellement représentés par des micro-oedèmes et des micro-hémorragies cérébraux, le plus souvent asymptomatiques et régressifs après une suspension temporaire du traitement. Beaucoup plus rarement peuvent se produire des hémorragies cérébrales symptomatiques. C’est pourquoi nous devrons sélectionner les patients qui ont le moins de risques de présenter des complications vasculaires cérébrales, essentiellement sur la base de leur statut génétique et de leur état vasculaire cérébral. En outre, il faudra réaliser régulièrement des IRM cérébrales entre les perfusions des traitement pour détecter d’éventuelles modifications vasculaires induites par le traitement, surtout pendant les premières semaines. Nous allons donc évoluer vers un mode de prise en charge plus personnalisé et plus participatif car nous devrons fournir au patient et à ses accompagnants tous les éléments d’information de manière compréhensible et décider, ensemble, de commencer un traitement susceptible d’avoir des effets positifs mais non dénué de contraintes et de risques.
Ces traitements ne seront pas proposés aux patients qui présentent une forme plus évoluée de la maladie et qui représentent la grande majorité des malades que nous suivons, et pour lesquels la prise en charge médicamenteuse et non médicamenteuse doit rester une priorité.
Ces traitements seront-ils bientôt disponibles en France ?
L’avis de l’Agence européenne du médicament sur le Lecanemab est attendu en fin d’année. Sous réserve d’une AMM européenne, il n’est donc pas exclu que cette molécule intègre le soin courant en France dans le courant de l’année 2024. Ce sera un peu plus long pour le Donanemab puisque les démarches viennent seulement d’être entamées auprès de la FDA. Il y aura donc un décalage de quelques mois.
Les laboratoires qui commercialisent ces molécules ont aussi la possibilité de demander à l’Agence française du médicament et à la Haute autorité de santé un « accès précoce » (3) pour que les personnes malades qui y sont éligibles en bénéficient plus rapidement.
1 - Agence fédérale américaine des produits alimentaires et médicamenteux.
2 - Période au cours de laquelle les signes avant-coureurs de la maladie se manifestent.
3 - L'« accès précoce » est un dispositif qui permet à des patients en impasse thérapeutique de bénéficier, à titre exceptionnel et temporaire, de certains médicaments non autorisés dans une indication thérapeutique précise.
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